PEINTURES
Les jardins d’impossible acclimatation
« Teresa Araya manie de telle façon l’abstraction, que celle-ci finit par devenir ce que nous désirons au fond de nous: des récits, des fantaisies, des légendes des mille et une nuits de l’insomnie.
Sans qu’on s’en aperçoive, elle s’offre le luxe d’être lyrique. Ironique, elle approfondit le désenchantement. Bien plus, elle le préserve et le greffe pour nous le restituer en un jardin d’impossible acclimatation.
Faire table rase ne fait pas partie de son royaume. La cause et ses conséquences s’assument et rien ne nous rachète. Dans ses paysages, la simplification des formes débouche de plain-pied sur la transcendance naturelle.
En peinture on ne peut raconter le film ; il faut parler en termes de valeurs, tons, palette et matière. De style et d’élégance aussi. Et, de plus secret encore, d’envoûtement, que seuls connaissent ceux qui travaillent avec le feu.
De près, sa peinture apparaît plane, mais deux pas en arrière et elle vient envelopper et assaillir le regard. De près ou de loin l’ourdissage se complique toujours.
Signe double : ordre et harmonie en surface, jouissance minimaliste je m’aventurerais à dire. Mais dans les galeries souterraines, des veines où se profile le désespoir. Le cadre, la circonstance aussi lui sont indispensables car ils limitent l’espace de toutes les réponses, celles qui brûlent, les brillantes et les opaques.
Au-delà des paysages d’éboulis, à travers les lézardes des plafonds où s’engouffrent vents et tempêtes antiques, dans les sillons des matériaux récupérés d’autres incisions, Teresa Araya transmet et, simplement, nous grandit avec son orfèvrerie de pure archéologie. »
Luisa Futoransky